Le blog d'Hélène Bodenez 

 

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8 septembre 2008 1 08 /09 /septembre /2008 23:00

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Décryptage | Hélène Bodenez


 

Ils sont nombreux ces auteurs fébriles à essayer de savoir qui est Benoît XVI et à publier tour à tour leur vision des choses [1]. La presse les cite, et semble plus que désorientée dans ses réflexes par une personnalité désarmante , par un pape intellectuel, clair, et d'une liberté déconcertante [2].

 

De George Weigel, il n'est pas actuellement beaucoup question. Silence assourdissant ! Pas un mot dans les médias du dernier opus de l'auteur du Cube et la Cathédrale (La Table ronde), pas même une citation dans les chroniques du matin, à part sur RCF. Serait-ce le trou de trois ans entre la parution américaine et la traduction française ? L'auteur est-il trop papiste, de surcroît américain ? Les vieux réflexes gallicans joueraient-ils ?

 

Peu importe : les quatre cents pages (peu à côté du millier de Jean-Paul II témoin de l'espérance (Lattès), la biographie intellectuelle de référence vendue en France à plus de cent mille exemplaires) débarquent en français. Mieux vaut tard que jamais. Réjouissons-nous tout de même ! il y a quelque vertu à relire les événements si grands de 2005 avec ce recul imposé, et à laisser remonter à une mémoire si zappeuse des souvenirs intenses. Leur réactivation n'en est que plus féconde. À quelques jours du premier voyage en France du Saint-Père à Paris et à Lourdes, le retard apparent peut même prendre des allures de coup de la Providence. Benoît XVI, le choix de la vérité s'impose ipso facto comme livre événement , le meilleur du moment à lire d'urgence, éclipsant tous les autres de loin [3]. Il nous préparera sans nul doute à recevoir Benoît XVI et nous fera mieux connaître le successeur direct de Jean-Paul II, le successeur de celui qui nous avait visités tant de fois, et dont la dernière venue en août 2004, fut si touchante , précisément au sanctuaire de Notre-Dame de Lourdes.

 

À grandes crises, grands papes

 

Excellent livre, osons l'affirmer.

 

La force du livre vient en premier lieu de sa construction en diptyque, diptyque qui essaie de rendre compte de la succession pétrinienne allant d'exception en exception dans l'unité et la continuité, jamais dans l'opposition et la rupture. À grande crise, grands papes ! La grandeur de Jean-Paul II, de laquelle on part, prépare progressivement celle de Benoît XVI, quoique tout autre [4]. Pas de Jean-Paul III donc en vue. Le regard de Weigel se veut toujours ecclésial sans jamais pourtant déroger à la démarche critique de l'analyste. Gageure réussie que ces lignes franches et vraies et pleines de respect et d'amour de l'Église, ne se privant pas de diverses mises au point salutaires, qui amènent des pages sévères toujours argumentées par les écrits du pape lui-même, à l'égard entre autres de la curie, des conférences épiscopales, ou de certains prêtres ayant franchi le Rubicon [5].

 

Bien que le titre de l'essai annonce de façon programmatique la présentation du nouveau pape donné à l'Église, un tiers du livre n'en est pas moins dévolu à l'ancien, à Jean-Paul II, aux derniers instants héroïques et à la compréhension du choix de Dieu se manifestant durant le conclave.

 

Les pages de la narration de Weigel conduisant alors le lecteur de l'improbabilité à la certitude que Joseph Ratzinger était le choix de Dieu sont parmi les plus captivantes de son essai. Les grands pensants et les donneurs de leçons sont scientifiquement confondus. Les caricatures et les insultantes réductions sont à chaque fois levées par Weigel, non sans un humour lapidaire. Le faire dès 2005, avant tout le monde, signe évidemment une vraie compétence. La construction très travaillée, avec un soin spécial apporté aux titres, donnent la mesure des analyses profondes du passage de témoin, objet de l'étude du livre : Mort d'un prêtre , L'Église qu'a laissée Jean-Paul II , Les larmes de Rome, Le Choix de Dieu, le Conclave de 2005 , de Joseph à Benoît , En route vers l'avenir .

 

Un nouveau saint Benoît ?


Oui, continuité sans rupture. Les deux papes, le Polonais et le Bavarois, profondément européens, creusent le même sillon. Un Américain comme Weigel a sans doute mieux saisi cela que les Européens eux-mêmes. L'Église qui est mission porte donc à sa tête successivement des papes, chacun témoin moral mondial , qui ont compris tous les deux avec une acuité rare les causes d'une crise dans l'ordre des idées sans précédent sur les terres historiques du catholicisme : L'idée de l'humain, de la personne humaine, a déraillé. Si Jean-Paul II a été d'une prophétique intrépidité pour porter un premier coup d'arrêt à l'humanisme athée et à ses ravages, humanisme sans Dieu pouvant bien conduire à une posthumanité, Benoît XVI n'en est pas moins à l'ouvrage, malgré ses solides quatre-vingt un ans, et reprend le flambeau sur le terrain même de l'humanisation de l'humain [6]. À sa manière. Le nouveau Benoît, comme celui dont il a pris le nom, voit assurément la possibilité d'un "Nouvel âge des ténèbres" à l'horizon. La "dictature du relativisme" ne mènerait-il pas à un "nouvel obscurantisme" ?

 

Lucide, Weigel bien avant la controverse de Ratisbonne, comprend que Benoît XVI va bâtir là où Jean-Paul II a noué le dialogue . Son élection, aussi providentielle que celle du grand pape slave annoncée par le poète Julius Słowacki, n'a-t-elle pas aussi son prophète, le philosophe MacIntyre [7] ? Après avoir analysé la barbarie d'une culture dans laquelle le relativisme s'est uni au caprice et où l'émotion a remplacé la raison comme arbitre du jugement, MacIntyre terminait sur une comparaison frappante de notre situation avec ce que l'histoire connaît sous le nom "d'Âges des Ténèbres ". Mais observait le philosophe, "cette fois-ci, les barbares ne sont pas au-delà des frontières, ils nous gouvernent déjà depuis pas mal de temps. Et c'est de ne pas en avoir conscience qui constitue le danger où nous sommes. Nous n'attendons pas Godot, mais un nouveau saint Benoît, sans aucun doute très différent du premier." Pour cela, en mulet du Seigneur , tirant la charrette de Dieu en ce monde , et ainsi plus proche du Christ toujours, œuvrant sans relâche, ayant sacrifié plus que tout autre pour Sa vigne, celui qui n'a pas pu refuser les instantes prières de Jean-Paul II de travailler avec lui, celui qui n'a pas pu lui dire non deux fois ni démissionner, essaie d'obtenir à son tour de l'Église qu'elle se recentre sur le Christ, rappelle à temps et à contretemps la vocation ecclésiale de la théologie. Et quand il le demande après Jean-Paul II, cela ne relève de sa part même si le monde a du mal à le comprendre, ni plus ni moins que d'un souci profondément humaniste .

 

C'est ainsi que paragraphe après paragraphe sont tranquillement balayées les caricatures pour développer les rectifications qui s'imposaient à l'égard du cardinal bavarois, Joseph devenu Benoît. Le pape que le Seigneur a donné à l'Église n'est pas de transition au rebours de beaucoup d'analyses en 2005. Sur ce point encore Weigel voit juste tôt. Rien dans le caractère de Joseph Ratzinger n'autorise à penser qu'il puisse se considérer comme un pape de transition entre le pontificat de Jean-Paul II le Grand et quelqu'un d'autre. Son sens de la responsabilité de sa vocation est trop développé pour cela.

 

Qui aurait pu croire que sous l'austère cardinal préfet pour la Congrégation pour la doctrine de la foi que les médias renvoyaient se cachait un flegmatique ? Ses collègues se souviennent de lui comme l'homme le plus flegmatique de la CDF. Un jour qu'un collègue assez nerveux achevait un long exposé plein d'émotion sur un problème quelconque et concluait que toute cette affaire était "stupéfiante", Ratzinger ouvrit calmement le débat en faisant remarquer : "Ici, nous avons dépassé toute capacité de stupéfaction."

 

Une vraie joie.


Ajoutons encore que le pape que le Seigneur s'est choisi et dont Weigel contribue à nous faire connaître la singularité en profondeur est un homme rayonnant d'une vraie joie ; ce mozartien est fondamentalement heureux , et tout augustinien qu'il est ne propage aucun augustinisme, bien au contraire [8]. Préside à son inspiration théologique fondamentale un véritable réalisme, celui sans doute moins connu de l'évêque d'Hippone. Même d'un certain âge, le pape ne renvoie pas davantage l'image d'un homme faible ou qui s'économiserait pour reprendre certaines expressions plaquées de journalistes friands de réductions rapides. C'est un homme paradoxalement fort parce qu'il n'est jamais seul, porté perpétuellement comme il le dit par la communion des saints : Je ne suis pas seul. Je ne suis pas obligé de porter seul ce qu'en vérité je serais incapable de porter seul. Tous les saints de Dieu sont ici pour me protéger, me soutenir et me porter.

 

Père de la grande famille de Dieu, cette famille où il n'y a pas d'inconnus , subordonné au Christ et à sa Parole , Benoît XVI, le bien nommé, béni de Dieu, en première ligne vers la sainteté [9] qu'il désire tant promouvoir n'agit pas en monarque absolu [10]. Au service de la splendide vérité [11], en co-artisan [12], Benoît XVI la fait humblement resplendir. Weigel l'honore en lui rendant un hommage parfait. Et le titre français paraît dès lors très bon. Le titre américain God's choice avait déjà son livre en français (Le Choix de Dieu est un livre du cardinal Lustiger). Mais qu'à cela ne tienne ! Dieu est vérité. Les deux titres français et anglais se regarderont dans un clin d'œil théologique juste. Puisse ce livre contribuer à fissurer et à franchir le mur du silence dans lequel notre Europe en déclin s'enferme [13] !

 

BENOIT XVI, LE CHOIX DE LA VERITE
par George Weigel,
Mame-Edifa-Magnificat, août 2008, 427 pages, 23 €
Titre original : God's Choice: Pope Benedict XVI and the Future of the Catholic Church À commander en ligne avec notre partenaire Amazon.com : cliquez ici

 

Extrait
DEVANT LA CRISE DU MONDE MODERNE


Au cours des quarante années qui ont suivi le concile de Vatican II, Joseph Ratzinger a vu beaucoup de ses craintes concernant l'optimisme naïf, qui a influencé certaines lectures des possibilités offertes à l'Église dans le monde moderne, corroborées par les événements. Avec plus de prescience que d'autres, il a perçu que ce monde moderne , auquel certains dans l'Église avaient hâte d'ouvrir les bras, était lui-même en train de craquer de toutes parts. Et même si, à la fin du concile en 1965, Ratzinger ne prévoyait pas l'implosion de l'Occident qui allait survenir trois ans plus tard, il a regardé a posteriori 1968 comme la mise en œuvre historique logique de l'invraisemblance qui dominait depuis quelque temps les haute sphères de la culture occidentale, en particulier en Europe.


Le nouveau Benoît est un homme totalement convaincu que les idées ont des conséquences dans le monde réel et que des sociétés humaines honnêtes ne sauraient être fondées sur base de mensonges. La crise de notre monde postmoderne est très semblable à celle qu'a traversée la société des années 1960 : vrai et faux ont perdu leur vraie signification pour n'être plus que des signaux verbaux désignant des préférences individuelles. Pourtant, il semble au pape que des communautés humaines honnêtes ne sauraient pas davantage être fondées sur des ambiguïtés volontaires que sur des mensonges délibérés.


Comment envisager qu'un pape, quel qu'il soit, contemplant l'histoire mondiale de ce début de IIIe millénaire, puisse rester aveugle à certaines réalités ? Au XXe siècle, contrairement à ce qui a été volontiers imaginé à une époque qui prenait beaucoup de ses désirs pour des réalités, les convictions religieuses n'étaient pas en train de dépérir en tant que forces d'influence sur la culture, forgeant par là même l'histoire. Ce n'était pas vraiment une bonne nouvelle, bien sûr, parce que l'une de ces forces, l'islamisme radical, voyait depuis longtemps l'Occident devenu aujourd'hui postchrétien, comme un ennemi et une cible.


Benoît XVI le choix de la vérité, En route vers l'avenir, L'Église dans le monde postmoderne , p. 299-300.

 

 

 

 

[1] Isabelle de Gaulmyn (Benoît XVI, Le Pape incompris, Bayard), Philippe Levillain, (Le Moment Benoît XVI, Fayard), Michel Kubler (Benoît XVI, pape de contre réforme ? Bayard).
[2] Henri Tincq, Jean-Paul II, Benoît XVI et la France , Le Monde, 9 septembre 2008.
[3] À lire cependant, dans un autre registre, plus scientifique, La Pensée de Benoît XVI, par le Fr. Aidan Nichols op, qui vient de paraître chez Ad Solem. Une introduction synthétique à la théologie de Joseph Ratzinger qui est aussi une invitation à découvrir la pensée d'un des plus grands maîtres dans la foi de l'histoire de l'Église.
[4] Chaque fois Jean-Paul II lui a demandé de rester et, trois fois il est resté. L'homme que les foules proclamaient comme "Jean-Paul II le Grand" le 8 avril 2005 ne pouvait tout bonnement pas imaginer d'être pape sans avoir Joseph Ratzinger comme principal conseiller doctrinal , p. 250.
[5] Affaires entre autres relatées : l'affaire Boff, Curran, Dupuis.
[6] Vingt-quatre heures à peine avant la mort de Jean-Paul II, le 1er avril 2005, Joseph Ratzinger recevait à Subiaco le Prix Saint-Benoît décerné par la Fondation Vie et Famille. Weigel, qui explique longuement le choix de Joseph Ratzinger de son nom de pape, ne mentionne pas ce geste, a posteriori lourd de significations.
[7] Chapitre final d'Après la Vertu.
[8] Il y a sans doute là à ne pas manquer le tournant que le XVIIe siècle n'a pas su prendre et a même raté dans les grandes largeurs avec le jansénisme.
[9] L'affaire de l'Église est la sainteté, et la sainteté est la plus grande des aventures humaines, une aventure à vivre et dans laquelle se lancer avec les autres, vivants et morts , p. 287. Weigel rappelle également à juste titre les nombreux saints canonisés par Jean-Paul II, qui — mais peut-on le dire ? — essaient à n'en pas douter de lui rendre la pareille !
[10] Comme toujours l'Église avait davantage besoin de saints que de bureaucrates et de fonctionnaires et , quelque part, selon Ratzinger, elle ne promouvait pas la sainteté comme elle le devait. Rapport Ratzinger qui fit grand bruit en son temps (Il Rapporto).
[11] Les deux hommes (Jean-Paul II et Joseph Ratzinger) ont également partagé bien des déjeuners de travail pour mettre au point les principaux documents d'enseignement, parmi lesquels l'encyclique portant sur la théologie morale Veritatis Splendor, que Ratzinger décrivit un jour comme le texte théologiquement le plus élaboré du pontificat , p. 252.
[12] La devise épiscopale de Benoît XVI est Cooperatores Veritatis [co-artisans de vérité], p. 246.
[13] Europe : franchir le mur du silence p. 301-302.

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Published by Hélène BODENEZ - dans ÉGLISE - RELIGION ET SPIRITUALITÉ
17 août 2008 7 17 /08 /août /2008 23:00

Décryptage | Hélène Bodenez


Lors de l'Angelus du 10 août, achevant des vacances bien méritées au nord de l'Italie, le pape a remercié l'évêque de Bressanone, Mgr Egger, ses collaborateurs, mais aussi toute la ville et la région de lui avoir préparé un lieu tranquille , où il a pu récupérer de nouvelles forces .

 

Il est revenu sur les JMJ, occasion de méditer sur les recherches de l'homme contemporain, ne ce temps de vacances : Ces derniers jours, j'ai encore repensé à l'expérience vécue à Sydney, où j'ai rencontré les visages joyeux de si nombreux jeunes garçons et filles de tous les lieux du monde. Ainsi a mûri en moi une réflexion sur cet événement que je voudrais partager avec vous. Benoît XVI a tout d'abord constaté que dans la grande métropole de la jeune nation australienne, ces jeunes ont été un signe de joie authentique, parfois bruyante, mais toujours pacifique et positive. Malgré leur nombre, ils n'ont pas créé de désordres ni fait de dégâts .

 

Ces jeunes ont témoigné de la différence chrétienne : Pour être joyeux, ils n'ont pas eu besoin de recourir à des manières grossières et violentes, à l'alcool et à des stupéfiants. Il y avait en eux la joie de se rencontrer et de découvrir ensemble un monde nouveau. Comment ne pas faire de rapprochement avec les jeunes de leur âge qui, à la recherche de fausses évasions, font des expériences dégradantes qui débouchent souvent sur des tragédies bouleversantes ? Une recherche qui marque la société tout entière : Voilà un produit typique de l'actuelle soi-disant "société du bien-être" qui, pour combler un vide intérieur et l'ennui qui l'accompagne, conduit à tenter des expériences nouvelles, plus chargées d'émotions, plus "extrêmes".

 

Reposer l'âme, régénérer esprit

 

La conclusion s'impose : les vacances ne sont pas une évasion à la manière d'une fuite du réel, mais un repos dans l'écoute. Benoît XVI avertit : Même les vacances risquent ainsi de se dissiper en une vaine recherche de mirages de plaisirs. Mais de cette manière, l'esprit ne se repose pas, le coeur n'éprouve pas de joie et ne trouve pas de paix, au contraire il finit par être encore plus las et triste qu'auparavant. J'ai évoqué les jeunes, parce qu'ils sont les plus assoiffés de vie et d'expériences nouvelles et courent pour cette raison davantage de risques. Mais cette réflexion vaut pour tous : la personne humaine ne se régénère véritablement que dans la relation avec Dieu, et on rencontre Dieu en apprenant à écouter sa voix dans la sérénité intérieure et dans le silence (cf. 1 R 19, 12). Ainsi que le pape théologien le disait en ouverture pour lui-même, les vacances permettent non seulement de se détendre mais surtout de penser à Dieu et de penser aux hommes . Quand le pape pense à Dieu, le pape pense aux jeunes !

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Published by Hélène BODENEZ - dans ÉGLISE - RELIGION ET SPIRITUALITÉ
3 juillet 2008 4 03 /07 /juillet /2008 23:00

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Décryptage | Hélène Bodenez


Il ne faut pas manquer le film "Tabarly". Produit par Jacques Perrin, dont on sait le goût sûr et le talent cinématographique, ce documentaire paraît à l'occasion du dixième anniversaire de la disparition tragique du plus grand navigateur moderne.

 

Il en comblera plus d'un : épique et sobre à la fois, une narration magnifique, entre rythme des courses et pauses à terre. L'enfant qui voulait devenir amiral, le pilote qui devint officier de marine, l'ancien d'Indochine, lui, le pudique, fait découvrir et entendre de sa propre voix, grâce à un montage formidable, une vie intense, une vie de rêve, celle de navigateur à la voile.

 

La vérité de cette vie éclate à chaque image, à chaque plan. L'homme extraordinaire se révèle ainsi dans son obstination payante, sa volonté hors norme, son endurance exceptionnelle. Ceux qui comme moi, depuis leur jeunesse, ont suivi avec passion Éric Tabarly, et ils sont nombreux, auront beaucoup de plaisir à renouer avec les différentes époques et étapes qui défilent sous leurs yeux.

 

Chacun vibre à tel ou tel épisode, mais pour nombre de spectateurs ce sera évidemment la victoire de la Transat en 1976 sur Pen Duick VI qui restera le moment attendu : nouvel Ulysse réchappant de la tempête, celui qui ne donnait plus signe de vie, qu'on croyait avalé dans les vents mauvais, surgit de la brume sans crier gare à Newport, battant de deux heures Alain Colas et son monstre de quatre mâts Club Méditerranée. Moment d'exception que le triomphe humble du marin solitaire, qui n'a pas renoncé malgré la casse !

 

Drôle à chaque fois également, le décalage des journalistes qui ne savent pas questionner l'homme aux qualités rares, l'homme vrai, l'homme libre qui chérit les bateaux. Il leur renvoyait un tel poids de vérité qu'ils apparaissent toujours décontenancés jusqu'à en devenir bêtes dans leurs questions. On revoit avec bonheur une séquence d'Apostrophes : Bernard Pivot essaie tant bien que mal de se dépêtrer dans une interview difficile, aux prises avec cet invité improbable qui avoue ne pas aimer communiquer ! Rien de plus opposés, en effet, que le plateau de télévision et le pont d'un bateau !

 

Les bateaux


Inhérents justement à la vie de Tabarly, les bateaux, des bateaux mythiques auxquels le film fait la part belle : l'on apprend d'ailleurs que les Pen Duick – il y en eut sept ¬— le Paul Ricard, véritables mythes désormais, l'intéressent plus que la mer elle-même. Il y met toute son énergie, toutes ses économies toute son intelligence d'ingénieur. Ce n'est pas trop de dire qu'il invente la voile moderne, tout en regrettant dans le même temps que les multicoques ne soient pas aussi beaux que les monocoques, aussi élégants que son premier Pen Duick.

 

Pen Duick a tout de la légende : sa ligne parfaite, son bois et ses vernis étincelants, sa voilure immaculée ; sa coque noire et blanche surtout, entièrement moulée ensuite pour la version III dans un matériau léger, coque que les mains de Tabarly ont bâtie, poncée jusqu'à la douleur. Ses avant-bras avaient doublé de volume, confie-t-il. Pen Duick c'est aussi une mésange , littéralement petite tête noire en breton, le nom d'un oiseau : il travaillera à un bateau de course qui, de fait, volera sur l'eau : l'hydroptère.

 

De l'Odet, petite rivière en Bretagne, aux vastes océans du monde, de la Trinité-sur-Mer à Plymouth, ou encore New York du temps de ses Twins, Sydney, nous voilà conviés au spectacle d'une vie-voyage, d'un voyage qui s'est fait vie fantastique. L'anniversaire des cent ans de Pen Duick montrera, s'il en était besoin, à quel point Éric Tabarly n'était pas l'ours que bien souvent les médias renvoyaient : bien nombreux furent les amis et les coéquipiers qui ont répondu présents à l'invitation peu ordinaire de la fête du bateau-ami de toute une vie.

 

La marée n'attend pas

 

Qui était en fin de compte Éric Tabarly ? Un modèle que les jeunes devraient absolument connaître. Ces minutes précieuses de cinéma essaient d'explorer un héros du XXe siècle, ni superman ni surhomme, rétif aux messages, un homme ouvert au réel : un homme qui décidait de ne pas parler pour ne rien dire , un homme qui pouvait toujours, un homme qui aimait les courses avec les autres mais pas forcément les records personnels, un homme qui ne s'arrêtait pas sur lui-même et ses sentiments, un homme d'action, un homme parfaitement finalisé et qui anticipait sans cesse sur la manœuvre à faire. Il osait tout, y compris décliner une invitation à l'Élysée en expliquant à De Gaulle que la marée n'attendait pas. Citius, altius, fortius (plus vite, plus haut, plus fort) la devise olympique était faite sur mesure pour lui.

Dans une vision épicurienne, les Anciens ont parfois représenté la mort comme un plongeon. À Paestum, une tombe l'atteste. L'ironique trou dans l'eau de la fin en fut effectivement un. Gageons que cette dernière traversée en solitaire aura été une victoire de plus, et espérons, la plus belle d'entre elles.

 

Tabarly ? Le coureur des mers...

Le Breton qui savait faire gagner la France !

 

 

■ TABARLY

Un film de Pierre Marcel, produit par Jacques Perrin

Musique Yann Tiersen

http://www.tabarly-lefilm.com/

■ Au 29 juin se donne encore à Paris :

Gaumont Opéra Français

Le Balzac

L'Entrepôt

Les Montparnos

Majestic Bastille

MK2 Hautefeuille

Photo : Bernard Deguy, Pathé distributions.

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Published by Hélène BODENEZ - dans CINÉMA - MEDIAS - THÉÂTRE - MUSIQUE - PHOTOS
23 juin 2008 1 23 /06 /juin /2008 23:00

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Décryptage | Hélène Bodenez


On est sous le choc : l'épreuve est comme traumatique. Difficile de prévoir la perversion de L'Orestie d'Eschyle qui préside en ce moment à L'Odéon rénové. Les critiques des journaux, l'émission du Masque et la Plume sur France Inter, pour la plupart négatives pourtant, ne rendent pas assez compte de l' ensauvagement qui s'y déroule.

 

Pire : c'est dans les milieux catholiques qu'on vante l'intelligence du théâtre d'Olivier Py. KTO par exemple, réserve, promotion oblige, une heure d'interview dans son émission V.I.P. au directeur du Théâtre de l'Europe, et La Croix titre son éloge de la pièce Comme un acte de foi , allant jusqu'à y voir une messe pour une humanité souffrante . Quel abus, comme ces cloches chrétiennes au cri de joie de l'hymne final ou ces autres références à la Bible, comme le Tout est accompli d'Oreste !

 

Vu, de mes yeux vu, ce qui s'appelle vu

 

Car enfin qu'avons-nous vu de cette trilogie donnée successivement en deux soirs, pendant quatre heures cinquante ? Ne retenons pas ce dont tout le monde parle comme pour atténuer la déception et faire diversion. Ne parlons pas de ce chœur accompagné d'un quatuor. Jetons, en revanche, pêle-mêle, ce que son metteur en scène vous jette crûment à la figure :

 

L'esthétique du filet sur le visage, filet rouge sur le visage d'Iphigénie et noir sur celui de ses bourreaux. L'ambiance douteuse est donnée.

 

La parade très lascive d'Hélène menant Pâris jusque dans une domination malsaine. Son obscénité dépasse de loin ce qu'en avait fait la mythologie.

 

L'arrivée d'Agamemnon en DS noire sur laquelle s'accroche sa captive, la troyenne Cassandre, toute empêtrée dans un voile de mariée. Représentant la vérité, dont on sait que le mot grec aletheia renvoie précisément au dévoilement progressif, Cassandre se dévoile à mesure que sa transe prophétique se fait plus claire ; hystérique, elle finit - c'était facile - toute nue, comme cette vérité vulnérable qui n'est pas crue ; première prise en otage du spectateur d'une longue série à venir, manipulation de l'actrice obligée de se plier aux humiliations de son metteur en scène.

 

La pluie qui mouille la scène et qui tombe à verse sur des acteurs de plus en plus hirsutes, échevelés, pluie dans laquelle les tissus des costumes traînent contribuant à tout rendre sale et laid. Pourquoi en effet ne pas se réfugier sous des parapluies noirs ? qu'à cela ne tienne ! Il y en a dans les cercueils.

 

Parlons-en de ces cercueils entassés sur lesquels s'achèvent, dans la première partie, les ébats d'Égisthe et de Clytemnestre. Parlons surtout du cercueil d'Agamemnon en pleine scène dans toute la deuxième partie, sur lequel on se couche, on monte, on s'assoit, sur lequel on marche comme on marche également sur le clavier d'un piano – les deux seraient-ils confondus avec les marches d'un escalier ?

 

Le festin de Thyeste représenté par une gazinière à roulettes, maculée de sang, vous arrivant à toute vitesse sur la scène, avec des casseroles remplies de cette chair humaine et de ces os monstrueux qu'Égisthe gominé et sanglé de noir va éparpiller violemment sur scène avec, une fois de plus, projections de sang.

 

Oreste nu comme un ver dès lors qu'il a tué Égisthe : et ça dure. Pourquoi prendre le spectateur pour un ignorant : il sait bien que ce cinquième siècle de Périclès va voir la statuaire grecque s'épanouir. Et alors ? avait-il dès lors besoin de voir le petit-fils d'Atrée objet d'un surlignement pseudo esthétique aussi ordinaire ?

 

Du ciel, il ne tombe pas que la pluie purificatrice : un porc en descend aussi par un câble. Apollon le saigne, le sang gicle alors sur le torse nu et la tête d'Oreste.

 

Un homme nu encore, tenant le rôle de La Pythie prophétisant, dans un déshabillé noir transparent, à petites bretelles, lui faisant des épaules de déménageur, et se plantant bedonnant devant le public, jambes écartées.

 

Apollon, dans une robe argentée à petites bretelles toujours, déclamant avec sa voix grave la tirade de la nouvelle définition des liens du sang : on peut être père sans mère . Le dialogue prend un relief curieusement actuel et militant face à Athéna jouée par un homme.

 

Ajouté à cela, le tapis rouge où traînent les godasses d'Agamemnon, des seaux et encore des seaux, le glaive de Clytemnestre, des chaises qui ne servent surtout pas à s'asseoir, de la tôle ondulée modernissime décor mobile, du gravier, autant d'éléments de surprise peut-être mais qui ne durent que le temps de la seule première pièce. Indulgent, on voudrait se dire que, peut-être, le pire est passé. Mais non. Le pire est à venir. Aux deux derniers volets de la trilogie, on est plus que las. L'abattement est à son comble.

 

L'imagination violée


On aura beau vous expliquer qu'il s'agit d'une déclamation à l'antique, le pouvoir des mots hurlés est tué dans l'œuf. L'imagination du spectateur, l'autre scène capitale, est violée monstrueusement, tant le rythme d'un visuel choc prend le pas sur toute poétique. Les sortilèges de la poésie se sont définitivement tu, assassinés. Il n'y aura pas eu de parole jouée (à part peut-être le beau récit de la tempête) ; c'est voulu. S'est levé en bien des moments un beuglement vulgaire et prétentieux, auquel un orchestre et un balcon à peine rempli (l'on peut pourtant acheter des places à la dernière minute entre 2 et 5 euro) ont mollement applaudi contre toute esthétique et tout naturel plaisir.

 

Ce n'est pas le moindre paradoxe de notre société postmoderne que la dégradation d'une pièce qui précisément témoignait d'un perfectionnement de société par la sortie de barbarie et d'inhumanité. Paradoxe surtout que la mise en scène dégénérée d'un temps qui ne voulait plus l'être. Le contresens devient monumental. Dès lors, la leçon de civisme voulue par Eschyle ne peut plus exister. Olivier Py le voulait-il d'ailleurs ? Notre démocratie moribonde telle qu'en elle-même elle se donne en miroir dans une mise en scène libertaire, parle de sa décadence non pas de sa naissance. L'inversion à l'œuvre se déploie en de tels termes, en de telles scènes, qu'il n'y a vraiment plus de leçon possible. L'éducation de la cité et des cités qu'on aurait tellement besoin de retrouver aujourd'hui par la cérémonie tragique n'est plus pensée comme essentielle.

 

À ce stade de faillite, il faudrait pouvoir demander aux ministres de la culture et de l'éducation nationale actuels et à venir, (sous Jules Ferry, rappelons sans nostalgie que le Ministre de l'Instruction Publique était également le Ministre des Beaux-Arts), que les responsables des groupes scolaires, en particulier dans les théâtres subventionnés par nos impôts, soient légalement tenus d'informer en vérité les professeurs qui voudraient s'engager honnêtement dans des sorties culturelles.

 

Protégez la jeunesse


Le gâchis de L'Odéon dans sa débauche de moyens et d'effets grandiloquents rend triste. Certes, des expériences comme celle d'un Denis Podalydès à la Comédie française avec ses Bacchantes d'Euripide en 2006, devraient nous garder confiants, témoignant qu'il est possible toujours de voir un beau spectacle, sans toutes ces insanités. Mais, cela reste encore trop de l'ordre de l'exception heureuse.

 

Par bonheur, les générations actuelles de jeunes deviennent un peu plus rétives à ces supercheries, se laissent moins abuser ou manipuler. Avec une santé mentale et une liberté qui les honorent, certains d'entre eux décryptent avec sagacité les duperies de leurs aînés, se rebellent vite devant les délires idéologiques de quelques-uns.

 

Défendons-les en tout cas dans le droit qu'ils ont d'être respectés dans leur pureté et leur intelligence neuve. En tout cas, c'est à nous adultes et éducateurs d'essayer de le leur octroyer. Faisons nôtre l'ultime injonction d'Apollon aux Parques réconciliées : Protégez la jeunesse.

 

Donnons à notre jeunesse de connaître Eschyle au plus près, ce Grec fondateur avec tant d'autres de la civilisation européenne quoi qu'en dise Olivier Py, metteur en scène d'une pièce dénaturée, veilleur torse nu de la première scène, paradoxalement aveugle. N'entend-il donc pas sourdre le grondement dégoûté de ceux qui crient pitié, de ceux qui ne veulent plus danser, ni sur le pont d'Avignon ni sur les barricades de l'Odéon ?

 

*Hélène Bodenez est professeur agrégée de lettres à Saint-Louis de Gonzague (Paris).

 

 

Sous la religion, le boxon

La prochaine programmation de L'Odéon promet ! La saison 2008-2009 réserve pour septembre un Tartuffe de Molière mis en scène par Stéphane Braunschweig donné actuellement à Strasbourg. Merci à Libération de nous avertir si explicitement (contrairement à La Croix) :

Comment les protagonistes, qui s'affairent normalement au salon au premier acte, se retrouvent-ils, au dernier, dans une cave aux murs rongés de salpêtre ? Une brève scène muette, donnée en prologue, offre une partie de la réponse : en l'absence du maître de maison et du dévot pique-assiette, la famille ne s'ennuie pas : on baise ou se caresse, tandis que le home cinema diffuse un film porno. Cela ne dure que quelques secondes, presque une image subliminale — sous la religion, le boxon.

Sitôt la pièce commencée, la décence impose sa loi. Claude Duparfait joue un Orgon falot en pull et costume étriqué, VRP en nouveaux testaments et objets pieux, ou évangéliste planté à la sortie du métro derrière son petit étalage. Un type, en somme, que le désir travaille et terrorise. Le cadeau qu'il rapporte pour Tartuffe — un crucifix géant enveloppé dans du papier de soie — est presque aussi incongru qu'un godemiché XXL soigneusement choisi au sex-shop.

Extrait de

Un "Tartuffe" en pleine descente

par René Solis, Libération, 15 mai 2008.

Pour en savoir plus :■ L'Orestie, création d'Eschyle - texte français et mise en scène Olivier Py, sur le site de L'Odéon

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Published by Hélène BODENEZ - dans CINÉMA - MEDIAS - THÉÂTRE - MUSIQUE - PHOTOS
6 mai 2008 2 06 /05 /mai /2008 23:00

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Décryptage | Hélène Bodenez


L'inverse aurait étonné : presse dithyrambique pour la sortie de GTA IV, traduire Grand Theft Auto ( Vol géant de voiture, opus IV ). Méfiance. Le jeu vidéo le plus attendu de l'année bénéficie d'une mobilisation générale des journalistes ajoutant un ouragan d'éloges à une promotion tsunami.

 

Dans le flot des compliments assourdissants, l'on n'est d'ailleurs pas à quelques contradictions près comme ces deux mentions relevées dans un même article à propos du dernier né des jeux de Rockstar Games : Il vous permet d'échapper à la réalité et en même temps le scénario est sans doute l'un des meilleurs, c'est très réaliste ; le journaliste conclut au chef d'œuvre moderne .


Morale mise à part !

Ailleurs, surenchère oblige, c'est une œuvre d'art . Stratégique constatation qui permet ainsi de mettre de côté la morale! Ainsi ces incohérentes critiques [1] commencent-elles quasiment toutes par dire vouloir mettre la morale à part . De toute façon, c'est pour adultes, GTA IV a été classé M pour Mature par un organisme d'évaluation de jeu vidéo, soit pour des jeunes d'au moins 17 ans au pays de l'oncle Sam, d'au moins 18 ans en France, âges admis pour pouvoir supporter violence intense, de sang, de langage abusif, de fort contenu sexuel, de nudité partielle et d'utilisation d'alcool et de drogues . Voilà donc nos journalistes dédouanés. De quoi le sénateur de la Californie ou l'association Famille de France avec leur avertissement aux parents, la Nouvelle Zélande avec sa version allégée avaient-ils donc peur ?

Passons sur les enjeux financiers astronomiques (quatre cents millions de dollars prévoit-on en une semaine) et les millions de joueurs ciblés. Passons sur les prouesses technologiques d'une nouveauté vidéo-ludique interactive. Passons également sur ce sous-produit culturel entre BD et film de série B malgré des vêtements glacés de pseudo culture ou même d'art dont beaucoup voudraient l'habiller. Oublions un instant ces quotidiens allant jusqu'à se justifier en cherchant caution et crédibilité auprès de psychiatres et psychologues écoutés comme des oracles surtout s'ils sont américains et démontrant ainsi tranquillement que les jeunes savent évidemment bien faire la différence entre virtuel et réel : Ne pas jouer aux jeux vidéo peut être un "indice" de problèmes relationnels. Cela veut dire que si votre fils ado ne joue pas du tout aux jeux vidéo, en tant que parent, vous devriez vous demander s'il a les compétences nécessaires pour tisser des liens d'amitié, s'il n'est pas maltraité ou qu'il subit des relations pas équilibrées. Jusqu'où n'ira-t-on pas dans le déni et la mise en danger de nos jeunes ? Nous ne nous attarderons donc pas sur cette triste [2] et évidente inversion des choses, sur ces jeunes et moins jeunes qui se terrent devant leur écran sacrifiant le propre des relations humaines, silence, conversations, présences, gestes d'affection, sacrifiant l'homme dans ce qu'il a de plus humain, son intelligence, sa volonté, son cœur.


Ce n'est pas grave puisque ce n'est pas vrai.

Partons plutôt de la remarque d'un élève de 6e, d'un cyber jeune , d'un digital native [3], du nom donné à ceux qui n'ont pas connu le monde sans Internet. Depuis leur naissance ils auraient cumulé 10 000 heures de jeux vidéos. Notre élève a 11 ans, élève plus qu'astucieux, bonne éducation, chrétien même. À ma réprobation affichée à propos des jeux vidéos et de l'addiction qu'ils génèrent – ne suis-je pas qu'une Digital migrante ( née dans un univers papier ) –, il réagit avec une innocence qui me désarme toujours et me dit après le cours : Pourquoi ? ce n'est pas grave puisque ce n'est pas vrai.

Cet âge est merveilleux. Toute la question est effectivement là : tuer à haute dose des personnages — sans être pour cela d'ailleurs dans la configuration extrême de GTA IV où le milieu interlope vous fait évoluer entre vols, meurtres sordides, drogue, prostitution et sexualité SM, n'a-t-il aucune conséquence sur le joueur ? Est-ce faire seulement semblant de tuer ou a-t-on en son cœur tué ? Que dire de cette intention de tuer virtuellement ? De fait, il n'y a pas de mort, pas de privation de vie, pas de cadavre, pas de matière à l'acte. Il n'y a même pas d'acte.

Intentionnalité dévoyée

Peut-on dès lors parler de transgression dans les mondes parallèles du virtuel ? Voler, tuer, user du sexe de manière débauchée, commettre l'adultère – autant d'actes désordonnés et condamnés par les sagesses les plus reculées dans le monde réel – est-ce anodin d'une part, répréhensible d'autre part pour le joueur bien réel qui commet cela dans un monde virtuel, ou devrions-nous seulement dire : qui projette cela dans un monde virtuel ? La liberté dans de telles circonstances est-elle engagée ? si oui, l'est-elle entièrement ? Le joueur ne blesse-t-il pas en réalité sa propre nature d'homme plus que celle d'un autre et n'y aurait-il pas dès lors, d'un point de vue chrétien, matière à péché ? Serions-nous là dans la forme subtile du péché par pensée ? Matière grave ? Quid de la volonté ? de l'intention si importante précisément dans la morale chrétienne ? d'une intention se portant sur un objet virtuel ?

Certes, l'homme — ou plus exactement cette marionnette mouvante le figurant, cet être virtuel extérieur à moi — que je vais par jeu tuer, pulsionnellement , n'existe pas, mais je veux le tuer. Je ne parle même pas de toutes les autres actions aussi délictueuses qu'abominables qu'on incite [4] à faire dans ces jeux. Mais enfin tout l'être n'est-il pas engagé ? L'irascible mobilisé, les passions ébranlées, la main donne bien l'ordre même si le consentement peut ne ressembler à première vue qu'à un réflexe. L'œil suit le meurtre de synthèse, enregistre le résultat pixelisé de l'acte mauvais répété au-delà de toute vraisemblance. La mémoire se souvient, et l'œil a mis en mouvement les différentes zones du cerveau auquel il est naturellement lié [5]. La pauvreté des dialogues crus est enregistrée. Si bien que si répercussions il y a dans la vie réelle, il faudra bien se rendre à l'évidence et se dire que cela vient non du jeu mais de la personne elle-même. Nous ne sommes pas contrairement à ce que l'on entend ici ou là dans une simple catharsis, mais dans toutes les étapes d'une intentionnalité humaine qu'on dévoie, dans toutes les étapes de ce qui est lié à l'immanence de la pensée ou de la volonté qui est en moi, qu'on déconstruit.

Quelque chose d'inédit

Par rapport aux films ou aux livres d'action violents et/ou pornographiques où le lecteur spectateur est passif, subit l'histoire que quelqu'un d'autre manigance pour lui (sa liberté de voir ou de lire reste entière), il y a quelque chose d'inédit. En cela, il faut oser se démarquer d'une argumentation attendue [6]. Le jeu vidéo, alliant pourtant fiction et image comme le livre et le film, engagerait davantage la liberté de la personne, notamment au début, dans la mesure où la personne est en amont d'une interactivité qu'elle est censée vouloir, qu'elle est censée maîtriser et qui en fait tout le piment. Bien sûr, l'image littéraire, suggestive, laisse une plus grande liberté au lecteur qu'au spectateur l'image cinématographique, déjà totalitaire, mais elle reste celle d'un narrateur qui happe le lecteur par l'histoire et les héros. Dans le jeu vidéo, c'est le joueur qui se happe lui-même ouvrant lui-même ses chemins, certes configurés mais finissant, dans un leurre de liberté, par le configurer également, par amenuiser progressivement cette liberté jusqu'à le robotiser. Dans une position initiale de domination et de toute puissance, dépassé par l'autonomie de la machine, le joueur s'enchaîne lui-même à elle de manière tragique. Le vrai drame est là en réalité. Quel est donc cet humain qui joue ce qu'il a de plus précieux, sa liberté et donc sa dignité d'homme ?

S'il est difficile en tout état de cause de faire face à des questions de plus en plus complexes, une prise de conscience des familles, des éducateurs, de tout adulte s'impose. L'intelligence grandissant au contact du réel existant, et la volonté, au contact du bien existant, on peine à mesurer les dégâts en cours sur la vie de l'esprit, et sur la capacité d'aimer attaquées dans leurs fondements. Il nous faut penser de manière concertée une révolution inhumaine [7] qui ne fait que commencer, avec recul critique salvateur, réflexion philosophique et regard de sagesse si nous ne voulons pas nous retrouver, pour un risque aussi mineur qu'hypothétique de décalage avec nos ados, obligés de vivre le risque bien plus réel du décalage complet avec le monde des représentations, des idées, des théories et de la culture.


*Hélène Bodenez est professeur de lettres à Saint-Louis de Gonzague (Paris).



[1] Libération du samedi 29 avril 2008 : le jeu est violent, subversif, immoral, profondément incorrect, très fréquemment grossier et diaboliquement addictif. Les ligues de vertu de tout poil ne s'y sont pas trompées, qui ont fait depuis longtemps du label GTA le symbole maléfique d'une industrie de toute façon suspecte... [...] Certes, GTA IV dégage davantage un parfum d'hormones que de savon. Comme ses illustres prédécesseurs, l'épisode promet d'être à la hauteur de la réputation de la série en termes de grossièretés, d'écarts sexuels, de cynisme mafieux et de crime gratuit (ou payant, ce qui est pire). Mais s'arrêter à cette surface adolescente et provocatrice serait ne rien comprendre. La conclusion du journaliste laisse sans voix !
[2] On ne peut que regretter l'analyse superficielle de Famille et Education, magazine de l'APEL de nov.-déc. 2007, où dans l'article Nos enfants à l'heure du numérique traitant des jeux vidéo, un abécédaire est proposé qui tend à minimiser les risques : A comme Addiction : La dépendance aux jeux vidéo ne concerne qu'une petite minorité de jeunes en proie à un grand mal être.
[3] L'élève numérique, comment pensent et apprennent les Digital Natives , Le Monde de l'éducation, avril 2008 : ... Et 10000 heures de conversations téléphoniques, deux fois plus pour ce qui est du temps passé devant la télévision, 200000 courriels et messages instantanés envoyés ou reçus, pour au mieux 500 heures de lecture.
[4] Proposer ou inciter. On remarquera que le premier verbe est souvent utilisé pour le deuxième dédouanant les hébergeurs ou autres responsables. En réalité, il faut le dire, on est en pleine incitation.
[5] La lampe du corps, c'est l'œil. Si donc ton œil est simple, ton corps tout entier sera lumineux. Mais si ton œil est mauvais, ton corps tout entier sera ténébreux (Mt 6,22-23). Comme l'enseigne saint Augustin : Le sens de ces paroles est que nous reconnaîtrons que toutes nos œuvres sont pures et agréables aux yeux de Dieu si elles sont faites avec un cœur simple, c'est-à-dire avec une intention surnaturelle et par un motif de charité, car la charité est la plénitude de la loi. Cet œil, c'est l'intention qui préside à toutes nos actions. Si elle est pure et droite, si elle n'a en vue que le but qu'elle doit se proposer, toutes nos œuvres qui reçoivent d'elle leur direction sont nécessairement bonnes. Ce sont toutes ces œuvres que Notre Seigneur appelle le corps (cf. Commentaire du Sermon sur la montagne, Liv II, chap. 13). Il faut noter ici qu'il s'agit de l'intention qui préside à toutes nos actions c'est-à-dire ce que nous avons appelé l'intention du cœur , P. Louis Pelletier, Comment vivre le combat spirituel , Cours de spiritualité à l'école cathédrale février 2004.
[6] Dans un article du Monde paru dans l'édition du 4 mai 2008 intitulé Le jeu vidéo, du gamer au joueur occasionnel , Laurent Michaud, spécialiste de l'institut français Idate dit : Je regrette qu'on se contente encore de ne parler des jeux qu'au travers de la violence de certains d'entre eux ou à l'occasion de faits divers. C'est un loisir important, avec des enjeux économiques colossaux, disposant d'une maîtrise technologique telle qu'elle irrigue aujourd'hui d'autres secteurs d'activité - la santé, la sécurité civile. Certes, il existe des titres violents (dont GTA) mais tout comme il existe des films violents ou des BD violentes. Bien sûr qu'il faut accompagner les jeunes joueurs, mais de la même façon qu'avec la télévision, les livres ou le cinéma.
[7] Le Monde, 27-28 janvier 2008, entretien : Pour nous adapter à la puissance des technologies numériques, il va falloir, affirme Olivier Dyens (La Condition inhumaine, Flammarion), professeur à Montréal, modifier en profondeur la vision que nous avons de nous-mêmes.

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Published by Hélène BODENEZ - dans RÉVOLUTION NUMÉRIQUE
27 mars 2008 4 27 /03 /mars /2008 00:00

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Décryptage | Hélène Bodenez


  

Trois ans après sa mort donnée comme un grand signe au monde, Jean-Paul II demeure dans les coeurs. Le grand vent de ses obsèques exceptionnelles s'est changé en brise légère. Le silence de la séparation est devenu rosée fraîche, descendant d'une fenêtre du ciel toujours ouverte, étanchant dans un goutte à goutte de la dernière chance la soif d'un monde qui ne sait plus à quelle source d'eaux vives se désaltérer. Mystérieuse communion des saints...

 

Trois ans après la mort du pape slave, les qualificatifs manquent pour dire la grandeur et la sainteté. L'on voudrait trouver le meilleur angle pour lui rendre hommage encore et encore. Tout a tellement été dit. Serait-ce l'angle de la miséricorde ? de la nouvelle évangélisation ? des jeunes et des JMJ ? du grand jubilé de l'an 2000 ? de la souffrance et de l'Évangile de la croix ? de la culture et de l'art ? du dialogue interreligieux ? l'angle de l'engagement politique même, de la résistance au nazisme, au communisme, de la résistance à toute forme d'idéologies mortifères, lui le pape qui fit tomber le mur de Berlin ?

 

L'amour du Pape Wojtyła pour le Christ s'est déversé sur le monde

 

Trois ans après, comment célébrer Jean-Paul II de la façon la plus juste et vraie ? Elles sont tellement nombreuses les notes du parfum de nard pur qui embaume aujourd'hui et à jamais toute l'Église. Nous voudrions pourtant en trouver la dominante délicate, celle qui porte toutes les autres. On essaie alors d'approfondir ce qui subsiste, comment l'odeur de sainteté demeure dans le cœur de tous ceux qui reconnurent Grand ce pape-là, comment la foi de tous ceux qui l'aimèrent, se meut, lutte, se purifie et grandit, grâce à lui le sportif de Dieu , lui dont l'ascension intérieure [1] n'avait rien à envier aux ascensions extérieures des monts qu'il affectionnait tant.

 

Trois ans après, ne cessant de méditer tous ces événements, constatons que le parfum n'est pas capiteux, mais que la senteur se fait fragrance subtile. Cette subtilité-là ne vient que d'un endroit. Et l'hommage s'impose alors de lui-même : c'est par la Vierge, la nouvelle mère d'un Karol devenu Jean-Paul, que l'auteur du Rédempteur de l'homme est toujours passé ; si c'est par elle, en elle même, que Jean-Paul II a tant voulu vivre du Christ, son tout , alors c'est sous l'angle de cette coopération unique dans l'histoire de l'Église que nous voulons nous aussi aujourd'hui l'honorer en ce troisième anniversaire de son retour au Père.

 

À quelques mois du voyage de Benoît XVI en France, et à Lourdes particulièrement pour le 150e anniversaire des apparitions, Lourdes lieu privilégié où les papes de ces temps qui sont les derniers consacrent donc leur mission pour le monde entier, l'angle de l'hommage devient plus évident encore.

 

Le pape ayant la Vierge pour manteau

 

N'aimerait-il pas, le pape au M bleu, que nous continuions de vivre alors de l'année 1987 ? De la Pentecôte 1987 à l'Assomption 1988, une année de Marie , est proclamée, une année entière pour approfondir le profil marial prééminent de l'Église. Le pape polonais écrit alors comme un deuxième volet à Redemptor hominis son encyclique inaugurale. La sixième encyclique du pontificat, encyclique post-attentat, Redemptoris Mater, est ainsi livrée en pleine année mariale, suivant de près l'année du Rédempteur de 1983. Bienheureux étions-nous de passer d'années de grâce en années de grâce ! De miséricorde en miséricorde !

 

Intrépide, Jean-Paul II ose [2] et insiste alors sur la coopération maternelle [de Marie] à toute la mission du sauveur par ses actions et ses souffrances , réalisée à la Croix. Par sa charité ardente, Marie entrait d'une manière tout à fait personnelle dans la médiation unique "entre Dieu et les hommes " qui est la médiation de l'homme Jésus-Christ . Pour le pape, l'Immaculée conception la prédisposait à la coopération avec le Christ, médiateur unique du salut de l'humanité . Et cette coopération, c'est précisément sa médiation subordonnée à la médiation du Christ.

 

Mais dans le cas de Marie, il s'agit d'une médiation spéciale et exceptionnelle . Jean-Paul II regarde comment Marie, prédisposée à devenir mère des hommes, joue un rôle prépondérant dans l'Église naissante, de la Croix à la Pentecôte en passant par le Cénacle. Dans cette lignée des premiers disciples vivant à l'ombre de la Vierge, et notamment de Jean le disciple que Jésus aimait , totus tuus, Jean-Paul II s'est revêtu de Marie, mère des vivants , et vécut en elle jusqu'à sa mort, elle qui fut donnée au monde, au pied de la Croix par Jésus à Jean, le disciple de son cœur. En disciple qui la prit chez lui , in sua, le pape veut d'une certaine façon ne passer que par Marie toujours mère, le Christ étant lui le premier passé par elle, la bien-aimée du Père. Suivant de près l'Agneau, Jean-Paul II vit une kénose qui ne pouvait se faire sans l'humilité de l'Immaculée. Dans tous ses voyages, ses actes privés et publics, dans toute sa geste de pape désormais mieux connue, on voit que Jean-Paul II n'a alors cessé de vouloir faire ce don au monde, le don de Marie, pleine de grâce , lui qui la recevait à chaque instant du Christ mourant et qui en connaissait la fécondité essentielle.

La médiation d'intercession de la Vierge, toujours mère [3]

 

Après l'Ascension, sa maternité demeure dans l'Église, comme médiation maternelle : en intercédant pour tous ses fils, la mère coopère à l'action salvifique de son Fils, rédempteur du monde. Après l'Assomption également, Marie continue d'intercéder et c'est ainsi que la médiation de Marie se poursuit dans l'histoire de l'Église et du monde.

En proie aux luttes de toutes sortes, à la maladie qui vient, avec un œil d'aigle, le pape qui fait entrer de manière pressée l'Église dans le troisième millénaire comprend le testament familial du geste au pied de la Croix, a compris depuis longtemps qu'un second Avent ne peut se préparer sans la Vierge, toujours mère.

 

Le pape, serviteur des serviteurs, approfondit, creuse plus que jamais le Voici ton Fils , et ainsi le rôle éminent de Marie, servante du Seigneur, mère du Verbe Incarné, mère de l'Église jusqu'au bout, jusqu'à la fin : Ainsi la maternité [de Marie] demeure sans cesse dans l'Église comme médiation d'intercession, et l'Église exprime sa foi en cette vérité en invoquant Marie "sous les titres d'Avocate, d'Auxiliatrice, de Secourable, de Médiatrice ". Ne sachant au fond ne pas faire autre chose que de donner Jésus, Marie a formé de manière éminente Jésus en ce pape d'exception, comme elle continuera de former Jésus en tous ceux qui la prendront chez eux jusqu'à la fin des temps. C'est de cette maternité substantielle de Marie que le pape Jean-Paul II a vécu : elle a fait de lui un enfant de Marie, dans une coopération continue au sacerdoce du Christ. De cela, de cette grâce de la Croix, Jean-Paul II a vécu jusqu'à sa mort sacrificielle, le 2 avril 2005, pas d'un superflu accessoire mais d'une grâce essentielle : il a porté sa longue mission avec sa Mère, in sua, Mère prévenante qui apprend à garder la parole, à rester fidèle au milieu de la lutte, à s'offrir dans l'amour.

Ce qu'il a fait.

 

Et dans son cœur Immaculé, dans une plénitude de foi, d'espérance et de charité, en mère des hommes, Marie a aimé Jean-Paul II comme elle a aimé Jésus.

 

Et à l'heure de notre mort

 

Dans Une Vie avec Karol (Parole et Silence), Mgr Dziwisz, le compagnon d'une vie, et spécialement des derniers instants, montre la solitude que chacun doit vivre face à la mort, regrette que l'amitié même ne puisse épargner cette douleur à l'ami. Il insiste, ému, dans la dernière page de ses mémoires poignants sur cette solitude totale et terrible. Maintenant, au moment de sa mort, il est parti seul. Je l'ai toujours accompagné, mais d'ici, il est parti seul... Et maintenant ? De l'autre côté, qui l'accompagne ? conclut-il.

Mais peut-on douter un seul instant que celui qui avait si souvent égrené ses ave et ses maintenant et à l'heure de notre mort soit vraiment parti seul, sans Marie pour viatique ?

 

Pour en savoir plus :■ Homélie du pape Benoît XVI prononcée lors de la messe en mémoire de Jean-Paul II à l'occasion du deuxième anniversaire de sa disparition

 

L'Église regardait Jésus à travers Marie

 

Marie n'a pas reçu directement cette mission apostolique. Elle n'était pas parmi ceux que Jésus envoya pour faire des disciples de toutes les nations (cf. Mt 28, 19), lorsqu'il leur conféra cette mission. Mais elle était dans le Cénacle où les Apôtres se préparaient à assumer cette mission grâce à la venue de l'Esprit de Vérité : elle était avec eux.

Au milieu d'eux, Marie était assidue à la prière en tant que Mère de Jésus (cf. Ac 1, 13-14), c'est-à-dire du Christ crucifié et ressuscité. Et le premier noyau de ceux qui regardaient avec la foi vers Jésus auteur du salut savait bien que Jésus était le Fils de Marie et qu'elle était sa Mère, et que, comme telle, elle était depuis le moment de la conception et de la naissance, un témoin unique du mystère de Jésus, de ce mystère qui s'était dévoilé et confirmé sous leurs yeux par la Croix et la Résurrection. Dès le premier moment, l'Eglise regardait donc Marie à travers Jésus, comme elle regardait Jésus à travers Marie. Celle-ci fut pour l'Église d'alors et de toujours un témoin unique des années de l'enfance de Jésus et de sa vie cachée à Nazareth, alors qu' elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son cœur (Lc 2, 19; cf. Lc 2, 51).

 

JEAN-PAUL II

Redemptoris Mater, n. 26 (25 mars 1987)

[sur la bienheureuse Vierge Marie dans la vie de l'Église en marche]

[1] Benoît XVI, Rome, Dimanche des Rameaux, 16 mars 2008 : C'est l'ascension vers "l'amour jusqu'à la fin" qui est la vraie montagne de Dieu, le lieu définitif du contact entre Dieu et l'homme.

[2] À propos de la Vierge Marie, Jean-Paul II n'a cessé d'oser : dans un article de la revue Communio, en décembre 2000, à propos de la parution de Fides et Ratio, le théologien Xavier Tilliette s.j. note la démarche hardie et téméraire de Jean-Paul II à vouloir nommer la Vierge table intellectuelle de la foi , elle qui donne à la vérité la saveur à laquelle elle a la première goûtée. De même, dans la revue Aletheia, de décembre 2006, le fr. Thomas Joachim f.s.j. précise que malgré un manque de donnée dogmatique et historique , le pape Jean-Paul II n'a pas hésité à affirmer que Marie a connu la mort, pas seulement une dormition, mais une mort d'amour, la mère n'étant pas supérieure au Fils .

[3] Le père Marie-Dominique Philippe a spécialement développé dans toute son œuvre l'aspect de la maternité divine de Marie.

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Published by Hélène BODENEZ - dans ÉGLISE - RELIGION ET SPIRITUALITÉ
3 mars 2008 1 03 /03 /mars /2008 00:00

 

Décryptage | Hélène Bodenez


"Buzz" de plus ? ou narcissisme du Net admirant la croissance de ses flux [1] ? L'avenir le dira. En tout cas, France Info lance Parlons Net , le premier club de la presse Internet en partenariat avec les grands sites d'information en ligne .

Cela devrait avoir lieu chaque semaine pendant quelque quarante-cinq minutes. Premier invité, Alain Finkielkraut le 24 février dernier.

 

Étrange invitation quand on a en mémoire les condamnations virulentes que l'auteur de Nous autres, modernes lance systématiquement à propos de la toile et de ses outrances . Pour l'animateur de Répliques, l'Internet, même s'il n'est pas que cela , est citerne de la haine , lieu où tout le monde peut y dire n'importe quoi . Pour le philosophe, un homme, ça s'empêche . Certes, il veut bien admettre du bout des lèvres que l'Internet trouvera probablement ses propres régulations peu à peu , mais que ça restera le propre d'Internet que de pouvoir se lâcher , absolument , sans inhibitions .

 

En cela, il est rejoint par Stéphane Denis qui dénonce dans le régime d'opinion qu'est le Net, la calomnie, la méprise et le malentendu [ayant] officiellement accès à la parole ( Les Dangers de l'interactivité , Le Figaro, 28 février). On a changé tout cela, aboli les distances et réclamé de la proximité .

 

Débrancher l'école

 

L'un des lieux emblématiques de la proximité, et de l'esprit participatif ou wiki[1] à tout crin : l'école. À l'heure où les pédagogues de l'école ouverte, toujours en mal d'idées neuves, ont finalisé l'entrée de l'Internet et du multimédia à l'école, il est intéressant d'entendre Alain Finkielkraut refuser avec véhémence l'idée qu'il faille éduquer au net pour rendre les enfants capables de décrypter l'actualité. Selon lui, contrairement aux idées admises, pour comprendre l'information, il faut d'abord en sortir . Volontairement empêcheur de penser de travers, Alain Finkielkraut affirme sans complexes qu'il faut débrancher l'école de l'Internet. Il faut commencer par armer les enfants ; l'école doit soustraire les enfants à la prison du présent .

 

Appelé à donner son avis à propos de Note2be.com, Alain Finkielkraut qualifie ce site de notations des professeurs par les élèves de résurgence de mai 68 . Alain Finkielkraut veut préciser que les élèves de Polytechnique qui le notent, lui leur professeur de culture générale, sont majeurs. À l'inverse, Note2be.com est, pour ce combatif exigeant d'une école du savoir, une véritable abjection . S'insurger contre Note2be.com en solidarité avec les professeurs relève alors de la légitime défense .

 

Il voit confluer la thématique soixante-huitarde, de l'égalité parfaite, quel que soit l'âge, et la société du spectacle. Les soixante-huitards doivent vraiment s'interroger : sont-ils les adversaires de la société du spectacle ou est-ce qu'ils se confondent avec ses valeurs ? D'un côté, la société du spectacle entre par le biais de l'évaluation à l'école, et là nous sommes au cirque, de l'autre nous avons des spectateurs qui notent leurs professeurs avec les critères du divertissement, de celui des guignols de l'info... Rien de plus inepte. Le monde du savoir, c'est forcément ennuyeux, pire douloureux... Qui va noter favorablement le professeur qui le fait souffrir ? Alain Finkielkraut conclut sur la contradiction majeure de ce site typique de la société du spectacle avec l'essence de l'école .

 

Autorité ou domination

 

Seul contre tous lors de l'émission "Ripostes" le 2 mars dernier, raillé par Daniel Cohn-Bendit, s'opposant clairement à Alain Madelin, il monte infatigable à nouveau au créneau en refusant la jeunesse comme idéal en réaffirmant avec nuance l'importance de l'autorité mise à mal par Note2be.com. Dans ses propos jugés autoritaristes, non, il n'y a pas retour à la construction d'une verticalité par peur. Il voit surtout mieux que les autres une grossière confusion, la confusion du concept d'autorité et de celui de domination , notamment quand il s'agit de l'école : L'autorité du maître ne blesse pas la liberté, elle l'investit.

 

À partir de 68, pour Alain Finkielkraut, s'est amorcé le grand mouvement de désinstitutionalisation de l'école française. On est passé de l'Institution à la communauté éducative , de la transmission du savoir à l'idéologie de la construction des savoirs . Grande faute vraiment pour notre philosophe que de ne pas distinguer le maître qui enseigne et le maître qui opprime , grande faute d'oublier qu'être enseigné fait partie de l'ontologie de l'être humain , grande faute que la famille soit espace de négociation perpétuelle .

 

Alain Finkielkraut martèle encore et toujours que la vertu du professeur c'est un savoir, une compétence qui n'est pas en possession de l'élève . Ainsi, à propos du site de notation de professeurs par les élèves, sa conclusion est sans appel... C'est peut-être le sens de l'histoire, mais ce que je sais c'est que l'histoire va dans le mur , laisse-t-il tomber accablé ... À la fin de l'émission, en professeur, il salue ceux qui essaient de penser autrement , et essaient de revenir au sens commun .

 

Merci, M. le Professeur — n'en déplaise à Dany !

 

Pour en savoir plus :■ France Info, Parlons Net, 24 février

■ France 5, Ripostes, 2 mars (voir notamment de la 34e mn à la 42e)

■ Qui doit noter les professeurs ?, par Hélène Bodenez, Décryptage, 22 février

[1] Le buzz (bourdonnement en anglais) est une technique marketing consistant, comme son nom l'indique, à faire du bruit autour d'un nouveau produit ou d'une offre (source Wikipedia).

[2] Rapide, vite en hawaïen.

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Published by Hélène BODENEZ - dans RÉVOLUTION NUMÉRIQUE
22 février 2008 5 22 /02 /février /2008 00:00

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Décryptage | Hélène Bodenez

À l'heure où les syndicats omnipotents informent les professeurs par un billet laconique de leur éventuel avancement et de ces notations administratives des chefs d'établissement qui ne pourront changer rien à rien, il est intéressant de voir surgir sur l'Internet note2be.com, un site de notation des professeurs par les élèves. Il serait dommage de ne pas faire un rapprochement entre les deux événements : une notation officielle vide de sens où l'on avance au dixième de point et le site d'un jury sauvage prétendu pertinent. Parallèlement aux commissions paritaires entre les syndicats et l'Éducation nationale où sont donnés les avancements, dont le fonctionnement ne laisse pas d'interroger (même les non-syndiqués sont informés de leur sort par les syndicats !), pousse, telle une excroissance maligne, une initiative sauvageonne et virtuelle aussi subjective que grégaire qui entend explicitement prendre le pouvoir.

 

Dans la présentation de ce projet à la presse, les co-fondateurs du site essaient ensuite d'atténuer ce que peut avoir d'anarchique un tel slogan, mais rien ne pourra masquer l'insurrection affichée en cours : il s'agit de liquider ce qui reste encore d'autorité. Et qu'on ne m'objecte pas que tout cela est bon ; Google fait déjà état de liens injurieux typiques des commentaires de bloggeurs insanes, salaire d'une indiscipline généralisée, délocalisée de façon permanente

 

(orthographe d'origine) :

Qui ne sait jamais dit : Quel conn*rd ce prof ;  c'est quoi ce devoir de m*rde ! L'heure de la vengeance à sonné ; ridiculise ton prof sur Not2be.com ! Fais-lui subir la pression du rendage de note (si, si, çà se dit) et inflige un bon et gros 0 (moi sadique ?!). Bien sûr, c'est à toi souvent d'inscrire le nom du prof si tes potes ne l'ont pas fait. Même si dans le fond çà ne sert pas à grand-chose, je ne peux pas décrire le bonheur que çà fait de saquer ces profs et de mettre comme appréciation : devrait se commander un cerveau pour noël ou encore le bon et vieux rageant : peut mieux faire (je le déteste celui là). Bon défouloir ! P.S : Ag***** tu va morfler!!!!! (sic).


Ainsi ouvre-t-on plus grand encore et toujours la boîte de Pandore laissant échapper le mal qui gangrène l'école. Les justifications les plus positives ne sauront faire prendre pour une avancée ce qui relève de la manipulation en plein débat sur l'école. Le site note2be.com pourra bien se dédouaner et se cacher derrière les conclusions du Rapport Attali qui aurait initié cette idée (décision 5) : « L'évaluation des professeurs ne peut pas reposer uniquement sur les notes qu'obtiennent leurs meilleurs élèves ni sur l'examen d'inspecteurs [...]. Elle doit aussi reposer sur une évaluation de leur pédagogie par leurs élèves... ». Il n'en reste pas moins coupable d'amalgame : ce cinquième point concernait d'abord l'évaluation des professeurs de l'enseignement supérieur, pas de ceux de l'enseignement primaire ou secondaire.

Les maîtres de leurs maîtres

note2be.com prétend d'abord améliore[r] les relations entre professeurs et élèves. On ne peut qu'ouvrir des yeux ronds face à une telle affirmation : comment le slogan « Note tes profs, prends le pouvoir » pourrait-il illustrer ce que l'équipe annonce, un site n'opposant pas les élèves et les professeurs ? La base égalitaire, revendiquée ensuite pour les élèves, n'annonce pas non plus grand-chose de bon. Elle sonne purement et simplement la fin de l'éducation. Plus d'autorité, plus d'éducation. Plus d'autorité dans la famille, plus d'autorité à l'école.

 

Il est donc fini le temps de l'éducation fondé sur le différentiel d'âge, de savoir, de compétences, de sagesse. Les élèves deviennent les maîtres de leurs maîtres. Et les professeurs, à qui les adultes évoluant dans des milieux professionnels peut-être plus brillants et surtout plus lucratifs reprochent tant d'être restés toute leur vie à l'école, devraient donc obtempérer, sans mot dire, infantilisés par leurs élèves. Pourtant l'urgence devrait être plus que jamais à une alliance forte des parents et des professeurs ainsi que l'appelle de ses vœux le pédopsychiatre Marcel Rufo dans un article du JDD (3 février 2008) : « je pense que le métier des parents, une fois pour toutes, consiste à imposer le respect des profs à leurs enfants. »

 

Comment ne pas voir dans le site note2be.com, qui revendiquera une fois encore la liberté d'expression au nom des droits de l'enfant, un blanc seing donné à des pratiques de déstabilisation accentuant l'indiscipline, fléau d'une école faible ?

 

Je note par exemple qu'un des noms épinglés sur le site est celui d'un professeur parti à la retraite depuis deux ans. Qui peut décemment croire qu'il s'agit, dès lors, d'une œuvre de vérité constructive quand les élèves qui écrivent sont protégés par un anonymat complet, qu'il y a possibilité de modifier l'identité d'un professeur (dans le forum certains demandent déjà comment l'on fait pour corriger les erreurs), possibilité de voter plusieurs fois sous diverses adresses, possibilité de voter sans même être élève du professeur noté, sans le connaître, ainsi que le fait savoir le site contrenote2be.com? Quelle autre profession doit vivre une évaluation publique, anonyme, par une autre voie que la voie hiérarchique ?

 

Il n'y aurait, nous dit-on toujours, que des critères de notation strictement liés à la pédagogie : aucun jugement de valeur sur les professeurs, mais une appréciation fine de leurs qualités professionnelles. Comment les élèves pourraient-ils en prendre la juste mesure ?

 

La note, publique, attribuée à un enseignant par un élève répondrait, nous affirme-t-on encore, aux critères suivants :

Intéressant : le professeur est-il intéressant ? Ses cours sont-ils vivants ? Fait-il participer la classe ?

Clair : est-il clair dans ses exposés, dans ses explications, dans son expression ?

Disponible : est-il présent en cours ? Est-il attentif aux élèves ? Est-il disponible en cas de problèmes ? Est-il disponible en dehors des cours.

Équitable : paraît-il juste avec les élèves ? Ses notes te semblent-elles justes ?

Respecté : a-t-il de l'autorité ? Fait-il respecter la discipline ?

Motivé : est-il motivé par son métier ? Est-il enthousiaste sur les sujets qu'il enseigne ? Sous des dehors objectifs, on repère sans mal dans toutes ces questions toute la marge de subjectivité qu'un jeune esprit en formation, peut-être même en difficulté, aura bien du mal à maîtriser.

 

Que des adultes, des parents, des chefs d'établissement ne voient pas l'urgence d'intervenir dans cette affaire pour protéger l'autorité, essentielle dans toute éducation, est proprement stupéfiant. Qu'on nous permette d'être sceptiques devant l'opinion d'Isabelle Hannart (SOS-Education), selon laquelle les bons professeurs n'ont rien à craindre de note2be.com : tous les principes peuvent-ils être bafoués au nom d'une libéralisation réelle de l'école ? La publicité n'a-t-elle pas fait d'ailleurs son entrée depuis quelques jours sur le site ? Je ne suis pas loin de penser, en outre, que la mesure de l'indiscipline des établissements sera palpable au nombre de votes d'élèves. En cela il y aura quelque chose d'intéressant à analyser. Certains établissements ne comptent toujours à cette heure aucun vote : seraient-ce des établissements un peu plus tenus ?

 

Les exigences de l'autorité

On mesure mal combien de tels sites, comme les blogs, sapent la motivation des professeurs, et les atteignent, eux qui ont tant besoin de force et de dynamisme dans la relation si particulière au groupe. C’est un aspect qu'on oublie trop souvent de l'autorité. Le professeur n'est pas toujours en relation personnelle stricte : il doit faire face au groupe qui a sa logique différente de celle de l'individu reçu seul dans un bureau, par exemple. La relation au groupe est usante, et demande une énergie de tous les instants. On ne parle pas à un groupe comme à une personne seule. À une énergie aussi essentielle dans ce métier, il ne faut pas toucher : y toucher c'est fracturer la motivation, mère de toute action et de toute efficacité.

 

Avec note2be.com, on voudrait achever les professeurs qu'on ne s'y prendrait pas autrement. En tout cas, ce n'est pas ainsi qu'on éveillera de nouvelles vocations. Ce n'est pas avec cet esprit de putsch qu'on fera advenir le mérite que beaucoup espèrent voir évalué à sa juste hauteur.

 

Qui doit, en fin de compte, évaluer et faire avancer les professeurs ? ni les élèves, ni davantage les syndicats. Et si la solution à opposer pour une notation vraie des professeurs n'était pas toute simple : une liberté plus grande, dans ce domaine très précis de l'avancement comme dans bien d'autres, laissée aux chefs d'établissement, plus qu'aux syndicats, dont tout le monde sait le pouvoir aussi exorbitant qu'intéressé.

 

*Professeur à Saint-Louis de Gonzague, Paris.

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Published by Hélène BODENEZ - dans ÉDUCATION
1 février 2008 5 01 /02 /février /2008 00:00

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Décryptage | Hélène Bodenez

Lille 2008 : la Communion missionnaire des éducateurs a tenu son huitième congrès depuis sa création lors du jubilé de l'an 2000. Signe de l'importance de l'événement, le communiqué de Radio Vatican qui a rendu compte des deux journées de travail des 150 participants, les 26 et 27 janvier dernier.

 

La brûlante question de l'éducation et de l'école valait plus que jamais ces deux jours intenses de réflexion et de prière.

Particulièrement remarquable en effet, l'inscription de ce congrès dans un profond climat spirituel : vêpres, messes, adoration, spectacle d'art sacré joué par Lucile Vignon (Le Château de l'âme, textes de Thérèse d'Avila), présence de l'Église en sa diversité — avec Mgr Léonard, évêque de Namur, soucieux d'unité, mais également avec plusieurs prêtres, frères de Saint-Jean en habit, prêtres en clergyman ou en pull...

 

Tout disposait les participants à recevoir les différentes interventions qui allaient nourrir et fortifier leur engagement aussi personnel qu'intérieur, plus qu'un engagement en réalité, leur mission . Lille 2008 fut un ressourcement essentiel et fraternel, un ressourcement de l'espérance. Retenons surtout l'appel appuyé de Mgr Léonard au cours de l'homélie du dimanche : Ce n'est pas seulement des valeurs, fussent-elles chrétiennes, que nous avons à introduire dans nos écoles, mais c'est bien une personne, la personne du Christ que nous devons laisser entrer dans nos écoles chrétiennes, toute la personne du Christ, qu'il faut laisser rayonner. En cela, on retrouvait bien l'esprit du Père Lyonnet, s.j. cité dans les tracts de la Communion des éducateurs : Le Christ n'a pas sa place dans l'éducation : il veut toute la place, il veut régner partout, et non à certaines heures. Il veut toute l'intelligence. Il veut tout le cœur de l'homme et toutes ses forces.

 

Lafforgue : appel à l'Église

 

Laurent Lafforgue, bien connu désormais pour ses paroles roboratives, n'a pas composé pour redire la vérité sur la débâcle de l'école . Sans désespérance mais avec toute la rigueur du mathématicien, il a dressé un tableau que certains se refusent toujours à regarder ou à admettre, comme en témoignent la récente publication de Philippe Meirieu (Pédagogie : le devoir de résister, édit. ESF) ou certains anathèmes entendus ici ou là sur ceux qui osent émettre des doutes sur la qualité du système scolaire.

 

L'original de Lafforgue, cet ancien élève de l'école publique, tient à son audace d'en appeler pourtant à l'Église. Pour lui, si l'école publique a eu son heure de gloire, c'est bien qu'elle restait irriguée dans le secret par la sève du christianisme . Elle a prospéré sur un fonds chrétien . C'est donc naturellement vers l'Église que Laurent Lafforgue voudrait se tourner pour que soit à nouveau assurée une transmission chrétienne des connaissances. Il bataille encore et encore, en prophète parfois mal reçu, contre une triple tentation à l'œuvre dans notre système éducatif bien mal en point : contre l'utopie corruption de l'espérance , contre le puéro-centrisme corruption de la charité , contre la capitulation de l'intelligence corruption de la foi . Notre Médaille Fields 2002 va jusqu'à dire que la crise de l'école résulte de la crise interne de l'Église. C'est sans doute vrai pour une large part.

 

Cet appel à l'Église, le père J.-L. Foerster o.p. y a répondu, à sa manière, en invitant les congressistes à plonger dans la méditation de la Parole de Dieu, insistant sur le grand mot de saint Grégoire qui disait que l'Écriture grandit avec celui qui la lit, appelant par la même les éducateurs à grandir avec ceux qui leur sont confiés. La parole est élan de transformation, de conversation, de Salut. Elle nous garde de tout esprit de fatalité.

 

Pro-éducateurs

 

Mgr Léonard a, le dimanche, sommet du congrès, pris acte à son tour, de l'appel de Laurent Lafforgue. En tant que métaphysicien, en tant que pasteur, l'évêque de Namur y a répondu en mobilisant tous les éducateurs de bonne volonté présents, les pressant avec douceur d'accepter dans l'admiration leur condition d'animal, non seulement le plus impotent qui soit, mais aussi surtout le plus ouvert qui soit au mystère de l'être, ayant besoin d'être acheminé vers son humanité.

 

Le prélat a montré la grandeur de la vocation d'éducateur qui n'est pas spectateur mais acteur de la vie d'autrui, éducateur qui accepte, dans l'humilité, d'être pro-éducateur conjointement aux parents pro-créateurs , c'est-à-dire relais de l'éducation divine du maître intérieur cher à saint Augustin. Très beau développement que l'analyse d'un aspect de la liberté par laquelle l'éducation est engendrée, à l'opposé du concept existentialiste où l'on se fait soi-même. Avec l'Église, et par l'Église, Ecclesia mater, l'éducateur éduit , doit être sur-meneur éveille chacun à sa vocation surnaturelle. C'est toute la portée métaphysique, anthropologique de l'expérience humaine de l'éducation que Mgr Léonard a ainsi mise en lumière. Portée considérable et trop oubliée aujourd'hui : l'homme est un être à éduquer. Le bagage héréditaire, biologique, ne le prépare pas à la liberté qui fait sa grandeur, à cet engendrement qui va vers le Créateur. Ainsi éduquer reviendra-t-il toujours à faire sortir les potentialités qui sont contenues dans la puissance en acte : l'éduqué aura donc toujours une dette d'être .

 

Faire grandir la communion

 

Des propositions de carrefours, comme par exemple celui de la catéchèse de la première annonce , essentielle dans des écoles au christianisme minoritaire de la société actuelle, ont permis de réfléchir au concret de situations inédites de la vocation d'éducateur.

 

En dernier lieu, l'économiste Thérèse Lebrun, président-recteur de la Catho de Lille, a fait écho à l'exigence du mathématicien qui avait ouvert le congrès. Insistant avec un pragmatisme énergique sur le concret de la situation sociologique dans laquelle on se trouvait, situation d'acteurs dans une société en profonde mutation, Mme Lebrun a souligné combien difficile et immense était la tâche des formateurs catholiques. Particulièrement appréciées des paroles fortes concernant la nécessité d'éduquer, d'être entrepreneurs dans des domaines aussi attendus, entre autres, que celui du handicap et de la dépendance.

 

L'équipe organisatrice conduite par Xavier Dufour, secrétaire général de la Communion missionnaire des éducateurs, le père Denis Branchu, aumônier de Saint-Jean-de-Passy, M. François Tellier du lycée Sainte-Thérèse-d'Avila de Lille qui recevait le congrès, Frédéric Chassagne, directeur du lycée de la Sauque (Gironde), aura proposé une rencontre de très grande qualité, aux prolongements désormais attendus : la communion n'appelle-t-elle pas vie et unité ? partage et mise en commun ? amitié et miséricorde ? Elle ne demande qu'à grandir pour que, plus enracinés dans la foi, les éducateurs voient leur espérance s'affermir et leur charité se réchauffer.

 

Faire grandir la communion, c'est participer chacun à son humble mesure au grand sauvetage de l'éducation : en ce domaine, il ne peut y avoir aucune concurrence, seulement urgence d'unité.

 

Pour en savoir plus :■ Le site de la Communioneduc.free.fr Communion missionnaire des éducateurs

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Published by Hélène BODENEZ - dans ÉDUCATION
15 janvier 2008 2 15 /01 /janvier /2008 00:00

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Décryptage | Hélène Bodenez

Christopher McCandless jette, un beau jour de plein soleil, sa vie en l'air, comme lors de la remise de son diplôme, il avait jeté en l'air sa toque d'universitaire. Il quitte tout.

 

Tout, promesse de carrière brillante, milieu familial aisé ; il s'affranchit d'un matérialisme étouffant dans une société de l'avoir, société des choses , société qui, à force de besoin d'avoir des besoins , lui apparaît monstrueuse et absurde. Pas de portable non plus, pas d'argent, pas de papiers.

 

Born in 68


C'est prémédité : il fait don de tout ce qu'il possède, soit plus de 24.000 dollars, à une société humanitaire œuvrant contre la faim dans le monde, puis refuse de remplacer sa vieille Datsun d'occasion pour la nouvelle Cadillac que ses parents en mal de paraître voulaient lui acheter. Et le moment venu, sac au dos, en roi de la route , cuir parce qu'il marche avec des chaussures en cuir contrairement à ceux qui vagabondent sur pneumatiques , il se lance, pendant plus de deux ans, par monts et vallées, fleuves et rochers, en quête d'une destination bien personnelle représentée par l'inhospitalière mais ô combien grandiose Alaska.

 

Ce film réalisé par Sean Penn, offre une quête métaphysique de sagesse, une option préférentielle pour la vérité, une cure par la nature : c'est ainsi que le protagoniste original de ces deux heures vingt de film arrivera enfin à assumer son vrai nom, à devenir ce qu'il est. Jusqu'à en payer le prix fort. Extravagant personnage, à n'en pas douter, que ce jeune né en 1968, parfaitement finalisé et déployant tant de détermination pour aller au bout de son désir et jouant son va-tout.

 

Cette histoire est une histoire vraie.


Est-il idéaliste rêveur, ce bohémien sympathique se cachant sous la fausse identité d'Alexander Supertramp (super vagabond) et voulant effacer toute trace de sa fugue ? Sans doute, mais plus encore, extrémiste . Tourmenté par une soif brûlante de lumière, il va, jeune présomptueux, essayer d'étancher sa quête dans une nature fusionnelle et purificatrice ; c'est peu de dire qu'il entre vraiment en communion avec elle. Superbe et généreuse, mise en valeur par une caméra agile et audacieuse, elle offre aux spectateurs de rares images de pittoresque et de beauté, des paysages aux espaces exceptionnels, des bêtes sauvages fascinantes.

 

Changement de point de vue


Au gré des rencontres humaines de Chris, des tranches de vie partagées — un couple de hippies complexe, un fermier primaire mais solidaire, une toute jeune fille grattant la guitare, mais surtout un vieux militaire douloureux, croyant en Dieu, qui irait jusqu'à l'adopter — notre jeune utopiste change de point de vue , lui qui croyait que la vérité ne se trouvait pas au cœur des rapports humains. La tentation du repli absolu a été grande, la liberté lui paraissant tellement délectable.

 

Si la nature bonne a été sa protection et le livre dans lequel il a lu son humanité, c'est pourtant perfide et cruelle, qu'elle le révèlera tout à fait à lui-même. C'est là, qu'ultimement se dessine l'intelligence du film. Relisant la définition de Tolstoï avec laquelle il semblait définitivement d'accord, Chris avoue enfin qu'il n'y a de bonheur que partagé.

 

D'autres rencontres ont lieu évidemment dans cette Amérique contrastée qu'il traverse, entre communauté de nudistes et couple de touristes nordiques, impudiques insensés. À chaque fois, volontairement choquantes, ses scènes permettent pourtant de mettre en valeur la pureté des intentions de Chris. Sans les mépriser, il rencontre ces produits frelatés d'une société dégénérée ; sans les rudoyer, il avance au large, et les laisse à leur superficialité dérangeante.

Si Sénèque a pu dire que voyager n'était pas guérir son âme, jamais démenti plus cinglant n'a été apporté : nous faisons un bout de chemin avec un héros brûlant et sensible, en mal de filiation, en mal de père... nous le voyons avec ce vieux monsieur lui livrant à la fin, en père précisément, une des clés du bonheur : Quand on pardonne, on aime ...

Nous vibrons émus de le voir enfin, dans un flash juste avant la mort, réconcilié dans les bras de ce père de la terre qui lui a fait tant de mal... Nous envions surtout cette réussite essentielle, après la souffrance sordide, de la grande rencontre avec Dieu le Père qu'il remercie en disant qu'il a été heureux : non, il n'y a pas d'idéalisme ici, mais le réalisme profond d'un itinéraire, que certains mettent souvent toute une vie à faire et que Chris McCandless obtient de haute lutte et à marche forcée à vingt-quatre ans.

 

Tragique chemin de Canossa

 

C'est bien de rédemption et de restauration qu'il s'agit dans ce film : salut de ceux qui rencontrent Chris. Cherchant à faire la vérité, il la fait advenir aussi chez les autres. Le couple hippie se reconstruit, le vieux militaire au regard humide retrouve un fils dans ces yeux qui croisent son chemin, lui dont la famille s'est éteinte tragiquement. Les parents de Chris en proie à une douleur indépassable se réconcilient et se rapprochent . Tragique chemin de Canossa.

Entre narration enchâssée, acteurs magnifiques, scènes éclatantes mais aussi scènes très éprouvantes, Into the wild est un grand film. À la gloire, à l'argent... je préfère la vérité , annonce l'homme qui sanglera ses reins d'une ceinture de cuir gravée de tous les épisodes de sa quête. La rencontre est sponsale. (Pour adultes.)

H. B.

■ Into the Wild

Film de Sean Penn avec Emile Hirsch et Vince Vaughn

www.intothewild.com

En salles depuis le 9 janvier

 

 


 

 

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Hélène Bodenez
"Travail le dimanche : la loi Macron, une loi carnaval"

 

 

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"Travailler le dimanche : une trahison de la gauche"

 

 

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Article 18 de la Déclaration des Droits de l'Homme

"Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, seule ou en commun, tant en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et l'accomplissement des rites."

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"La Voix est libre", émission du 8 novembre 2010 animée par Anne Gavini. "Comment redonner sa place au dimanche". Débat avec Monseigneur Lagleize, évêque de Valence. Hélène Bodenez, professeur à Saint-Louis de Gonzague-Franklin, Monseigneur Podvin, porte-parole de la Conférence des évêques de France. Par téléphone : Père Jacques Vignancour, curé de Saint Austremoine, à Issoires (Puy de Dome)

 


 

 

 

"Aujourd'hui l'Eglise", émission du 19 novembre 2008, animée par Elodie Chapelle. "Travail le dimanche : l'Eglise a son mot à dire" Débat  avec François Asselin et Hélène Bodenez.

 

 

 

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L'Association pour la Fondation de Service politique réunit des hommes et des femmes engagés dans la vie politique, économique et sociale. Elle est ouverte à tous ceux qui souhaitent participer à ses activités : colloques, conférences, universités, soirées-rencontres, campagnes de sensibilisation. De très nombreuses personnalités ont participé à ses travaux: chefs d'entreprise, cardinaux, universitaires, hommes politiques, journalistes.

14 juin 2011

The European Sunday Alliance is a network of national Sunday Alliances, trade unions, civil society organizations and religious communities committed to raise awareness of the unique value of synchronised free time for our European societies. Sunday and, more general, decent working hours, are the focus of our campaigns. In our Founding Statement, we draw attention to aspects of life/work-balance and social cohesion that depend on a vast majority of people to have their lawful free time at the same time.


Lancement de l'European Sunday Alliance, le 20 juin 2011 dont sont membres, entre autres, l'AFSP, la CFTC, le CAD.


 

CCF

Le centre culturel Franklin est inspiré par la tradition jésuite et permet de créer une synergie entre la formation intellectuelle, humaine et spirituelle dispensée aux élèves à Saint-Louis de Gonzague (Paris) et une certaine forme de formation continue destinée aux adultes de la communauté éducative. Ce que de manière traditionnelle, on appelait autrefois dans les collèges de la Compagnie : « école des parents », si non « école des adultes ». Le Centre culturel Franklin est ainsi un lieu de rencontres avec des personnalités uniques, un lieu de réflexion, un lieu d'échange et de débats.

Publications

 

51 Revue Rapport 03  Sexe-du-genre-Lp-55.jpg  Van-Thuan-revue-_-en-espagnol.png

 

- « Devoir des parents, bien de l'enfant », Francis Mouhot, Éduquer, est-ce encore possible ?, Les Idées, Revue Liberté politique, n° 60, (juin-juillet 2013), p. 157-158.

« Le Jésus de l’Histoire », À propos de Jean-Christian Petitfils, Jésus, Questions disputées, Revue Liberté politique, n°56, Privat (mars 2012), p. 195-201.

- « La bataille du dimanche continue », Revue Liberté politique, IIIe Rapport sur la doctrine sociale de l’Église dans le monde, n° 55  (décembre 2011), p. 115-119.

- « Lumière du pape », À propos de Lumière du monde, Questions disputées, Revue Liberté politique, n° 52, Privat (mars 2011), p. 155-161.

- « Le cas de l'année : la bataille du dimanche en France et en Europe  », Revue Liberté politique, IIe Rapport sur la doctrine sociale de l’Église dans le monde, n° 50 (septembre 2010), p. 75-84.

- « La Battaglia sulla domenica in Francia », Rapporti dal Mondo, Osservatorio internazionale cardinale Van Thuan sulla dottrina sociale della chiesa, Bollettino di Dottrina sociale della Chiesa , (Anno VI 2010, numero 3, luglio-settembr), p. 87.  

  - « Le dimanche, un droit historique », À propos de Daniel Perron, Histoire du repos dominical, Questions disputées, Revue Liberté politique, n°50, Privat (septembre 2010), p. 185-190.

 - « Une truculente défense du pape », À propos de Gaspard-Marie Janvier, Minutes pontificales sur le préservatif, Questions disputées, Revue Liberté politique, n. 49, Privat (juin 2010), p. 161-164.

- « Le dimanche, jour cardinal », Communication à la table ronde du 6 octobre 2009 "Vivement dimanche !" au Centre culturel de Franklin, Revue Liberté politique, n°. 47, Privat (décembre 2009), p. 23-31.

- « Voyage au cœur de la psychothérapie », À propos de Francis Mouhot, Le Moi et l’esprit, Questions disputées, Revue Liberté politique, n. 46, Privat (septembre 2009), p. 143-152.

- « Pourquoi le dimanche ? », Dossier "A Dieu, le dimanche ! Appel à la résistance des chrétiens", Revue Liberté politique, n°. 44, Privat (mars 2009), p. 107-116.

- « Benoît XVI le bâtisseur », À propos de George Weigel, Le Choix de la vérité, Questions disputées, Revue Liberté politique, n. 43, Privat (décembre 2008), p. 181-185.

- « Lâcher prise ou abandon spirituel », À propos de Robert Scholtus, Faut-il lâcher prise : splendeurs et misères de l’abandon spirituel, Questions disputées, Revue Liberté politique, n°. 42, Privat, (septembre 2008), p. 167-174.

- « Retrouver les chemins de l’être », Dossier Fides et Ratio 2008-1998, Revue Liberté politique, n°. 42, Privat (septembre 2008), p. 153-163.

- « Les métamorphoses de Jésus ou la tentation de l’expérience directe », À propos de Frédéric Lenoir, Le Christ philosophe, Questions disputées, Revue Liberté politique, n°. 41, Privat( juin 2008), p. 235-244.

- « Et le blog devint fléau », Éducation : questions qui fâchent, Revue Liberté politique, n°. 40, Privat (mars 2008), p. 147-157.

- « Conversion ou initiation : le presque de la foi », À propos de Jean-Claude Guillebaud, Comment je suis redevenu chrétien, Questions disputées, Revue Liberté politique, n°. 38, Privat (septembre 2007), p. 125-131.

- « Relire La Pensée captive », À propos de Cesław Miłosz, Questions disputées, Revue Liberté politique, n°. 32, Privat, (janvier-février 2006) p.129-141.

À lire absolument !

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Daniel Perron, Histoire du repos dominical (L'Harmattan, 2010).

 

gaspard-marie-janvier.png

Gaspard-Marie Janvier, Le Dernier dimanche (Mille-et-une-nuits, 2009, Prix Mottard 2009). 

 

Froger2

Jean-François Froger, Le Maître du Shabbat (Editions Grégoriennes, 2009)

 

Gourrier2.png

Patrick Gourrier, Le dimanche, c'est sacré ! (Letheillieux, 2009)

 

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Michel Fauquier, Lettre ouverte du dernier des Français au premier des Français, (Tempora, 2009)

 

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Carte trvail dominical 
Dimanche

Fonctions sociales d'un jour à part

Noyau d'un ordre social historique

Vidéos créées pour ce blog.

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Dimanche

 

 

 

À Dieu, le dimanche !

H. Bodenez

 

A Dieu le dimanche !

Mis en danger par la proposition de loi Mallié, le dimanche est moribond en France. Ce livre voudrait lancer un appel à la résistance des chrétiens. L'argument religieux n'étant pas le plus développé dans un débat essentiellement politique et social, Hélène Bodenez voudrait que ne soit pas minimisé le regard de foi de la vision théologique et de la vision mystique. Admettons-le : le dimanche s'est vidé depuis longtemps de son sens originel. Pourtant, si le culte du dimanche suppose bien la foi intérieure des chrétiens, il n'en est pas moins un rituel extérieur et collectif. En en retrouvant la voie, les chrétiens pourraient participer à la mission de la France dans l'Église.   Acheter à La Procure

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Joseph Thouvenel a lu  À Dieu, le dimanche ! Ed. grégoriennes) Chronique Economie et société sur Radio Notre-Dame, 12 décembre 2010.

 

 

Faut-il faciliter le travail le dimanche ?

 

KTO

    

Pourquoi le dimanche est-il un jour chômé ?

 

 

 

L'écho des dimanches

Duo Zucchero - Fiori, paroles françaises de J.-J. Goldman, (Chocabeck, 2010).

"Dans mon village, j'ai vu le temps se poser..."